Il serait judicieux de vacciner les garçons contre les papillomavirus
INTERVIEW – Le Dr Hélène Borne, gynécologue spécialisée dans la prise en charge du cancer du col de lâutérus (Paris-VIII), déplore le manque de vaccination en France.
LE FIGARO. – Pourquoi les Français sont-ils si réticents à la vaccination anti-HPV?
HÃLÃNE BORNE. – Il existe un fort mouvement de défiance. Les Français ne font plus confiance aux médecins et aux politiques qui se sont peu engagés en faveur de cette vaccination. La circulation de «fake news» autour du Gardasil y a beaucoup contribué (le vaccin a été injustement suspecté en 2013 de provoquer des maladies auto-immunes chez les jeunes filles vaccinées, NDLR). Et, bien que des études menées par lâAssurance maladie et lâAgence nationale du médicament aient montré quâil nâétait pas en cause, le mal était déjà fait. La réalité scientifique nâest plus entendue par les Français, câest dramatique.
Comment les convaincre alors?
Il faut que les pouvoirs politiques sâengagent davantage en faveur de cette vaccination. Les pays pour lesquels les campagnes de vaccination ont lieu en milieu scolaire ont une très bonne couverture vaccinale. Câest un message fort envoyé à la population. Nous devons également mettre en avant les résultats obtenus en vie réelle. LâAustralie le prouve: le vaccin est efficace et permettra dâéradiquer les maladies liées aux infections HPV, et à terme le cancer du col de lâutérus. Je pense, par ailleurs, que le discours antivaccin doit être sanctionné plus sévèrement car nous aurons beau réaliser des études sérieuses et indépendantes pour démontrer lâefficacité et lâinnocuité du vaccin, les «fake news» brouillent le message.
Pourquoi est-ce si important de vacciner aussi les garçons?
Le tribut payé par les garçons est moins important que chez les filles. Néanmoins, on connaît le risque de cancers de lâanus chez les hommes ayant des rapports sexuels avec des hommes. Câest pour cette raison que de nombreux pays recommandent la vaccination des homosexuels mâles. En revanche, certains pays comme lâAustralie ou lâAutriche ont inclus tous les jeunes garçons dans leur campagne. Câest un choix judicieux car les garçons peuvent être porteurs des virus, sans même être malades. En les vaccinant, on augmente la couverture vaccinale et les chances dâéradiquer les papillomavirus responsables de cancers graves (col de lâutérus, vagin, vulve, gorge et anus).